Foutue timidité !

Publié le par Cathy

Pour ceux qui ont lu mon deuxième roman « Le Passé Recomposé », vous savez que l’héroïne, Johanna, est extrêmement timide au début de l’histoire. Pour les autres, vous venez de l’apprendre J. On me demande souvent s’il y a une part d’autobiographie dans mes romans. Je crois que tous les auteurs vous répondront qu’il est impossible d’écrire sans faire référence, au moins une fois, à notre vie, que ce soit une anecdote, un lieu, un trait de caractère ou une connaissance… Pour mon second roman, ce fut donc la timidité.

 

Timide, je l’ai été durant toute mon enfance et mon adolescence. J’avais la chance d’avoir une maman au foyer et j’ai traîné dans ses jupes jusqu’à l’âge de 5 ans et demi. Nous nous amusions bien à deux et ni maman ni moi n’étions pressées que j’entre à l’école. Quand j’y repense, nos journées étaient assez cool à l’époque : papa et mes 3 frères étaient au travail ou à l’école, les autres enfants et jeunes du coin étaient eux aussi à l’école, le quartier était calme, presque rien qu’à nous. Maman me prenait sur son vélo et on allait se balader ou faire des courses. Oui, c’était la belle vie. Puis il a bien fallu se résigner à m’inscrire en maternelle. J’y suis entrée en troisième année, après Pâques. Hé oui, pour quelqu’un qui n’a fait que 3 mois de maternelle, je m’en tire plutôt bien non ? J

C’est là que les ennuis ont commencé… Il ne s’est pas passé un matin sans que je pleure, que je hurle, que je m’accroche aux jupes de ma maman. La pauvre, quel calvaire ça a dû être de me laisser dans cet état chaque matin ! Quand je ne pleurais pas, j’avais droit à un chokotoff de la part de la maîtresse.  Autant vous dire que je n’en ai pas reçu beaucoup !

Malgré la présence de ma petite voisine que je connaissais bien, j’étais terrorisée par tous ces enfants, ainsi que par « Madame Jacqueline », pourtant si gentille. Je n’osais ouvrir la bouche et ne pensais qu’à rentrer à la maison auprès de maman. Ma petite voisine s’est avérée être une peste (je vous rassure, ce n’est plus le cas) qui me disait de méchantes choses. Elle avait trouvé mon point faible : ma maman, et se faisait un malin plaisir de la critiquer en chuchotant à mon oreille (du style : « les robes de ta maman sont moches », vous imaginez l’horreur ? J). Moi, je pleurais immédiatement et elle, elle volait au coin car la maîtresse avait vite compris son manège. Ma voisine me regardait ensuite d’un air désolé, et puis recommençait le jour suivant.

Ensuite, ce fut l’entrée à la grande école, en première année primaire. Mes parents se demandaient comment j’allais gérer ça, maman avait déjà peur de m’y emmener. Bizarrement, il n’y a pas eu de problème. Pas une larme ! J’ai retrouvé avec plaisir mes copines de maternelle et je n’ai (presque) plus jamais pleuré. Par contre, question timidité, ça ne s’est pas arrangé. Je n’ouvrais pas la bouche en classe, ne levait jamais le doigt, était terrorisée si on m’interrogeait, et devoir aller au tableau était une épreuve digne des jeux olympiques. Et ça a été ainsi durant mes six années primaires. Je me souviens d’une année où St-Nicolas était venu nous rendre visite. J’étais en 2ème année primaire. Il y avait un petit spectacle sur la scène donné par les élèves en pédagogie. Ils nous avaient attribué un numéro à tous et certains étaient tirés au sort pour monter sur scène près du grand Saint et de Père Fouettard. J’étais pétrifiée, et la chose qui devait arriver arriva : mon numéro fut tiré au sort. J’ai tellement pleuré de trouille qu’une copine est montée sur scène à ma place… ! Une autre fois, j’avais été malade durant une semaine et le jour où j’ai repris les cours, mon institutrice (4ème primaire si ma mémoire est bonne) m’avait demandé de venir la voir 1/4h avant la classe afin de m’expliquer quelque chose. Rien de grave… et pourtant je suis arrivée catastrophée et en larmes, tellement j’avais la hantise de me retrouver seule avec la prof ! Pas de quoi être fière n’est-ce pas ?

Ensuite, ce fut l’entrée en secondaire, dans la même école. Les remarques dans mes bulletins ne variaient pas beaucoup : « Ne participe pas assez », « Est trop effacée »… J’étais toujours aussi tétanisée quand on m’interrogeait ou quand je devais aller présenter un travail devant toute la classe. Un vrai calvaire !

 

Malgré tout, j’avais beau être enfermée dans une coquille, j’avais heureusement pas mal d’amis. Mais en y réfléchissant bien, je n’avais pas souvent le dernier mot et je me laissais régulièrement marcher sur les pieds. Je n’osais pas dire « non », je pardonnais facilement, j’étais en fait la copine idéale, mais surtout une bonne poire…

 

Puis la fin des secondaires est arrivée, et avec elle, le choix crucial d’un métier, d’études, d’école… J’ai été incapable de me décider. J’avais eu la chance de passer 12 ans dans la même école, avec les mêmes amies, les mêmes profs, les mêmes repères, et tout ça près de chez moi. Et là on me demandait de tout quitter et de recommencer ailleurs. Je ne savais absolument pas vers quel métier me tourner et n’ai pas voulu entamer des études que je n’étais pas sûre de finir. J’ai donc abandonné… Mais inutile d’être hypocrite : ça m’arrangeait bien ! J’étais terrorisée rien qu’à l’idée d’entrer dans une autre école, avec des inconnus, aucun repère, loin de chez moi. J’entendais également parler de tous ces baptêmes qu’on imposait, qui tournaient mal (aujourd’hui, il y a des lois contre ça), on m’a bourré la tête d’exemples terrifiants que je ne voulais surtout pas vivre. Tout ça a contribué au fait que je me suis retrouvée chez mes parents au chômage…

 

C’est là qu’une autre vie a commencé. MA vie. Pour trouver du travail, il a bien fallu que j’apprenne à sortir de cette foutue coquille. Imaginez un peu que, jusque là, lorsque je devais entrer dans un petit magasin (style boutique, librairie, pharmacie, …) je passais d’abord plusieurs fois devant la vitrine en observant l’intérieur avant d’oser entrer d’un pas mal assuré. Si le vendeur ou la vendeuse avait repéré mon manège avant, c’est simple, je n’entrais pas !

J’en étais donc encore à ce stade lorsque je me suis mise à chercher du travail. Et c’est ça qui m’a fait, tout doucement, sortir de ma coquille : l’entrée dans la vie active. Devoir se présenter au Forem, au Syndicat, aux employeurs, s’inscrire à des formations,… De petits boulots en petits boulots, de formations en formations, j’ai appris à avoir plus confiance en moi, à mordre sur ma chique, et tout doucement, le contact a été plus facile avec les autres, mes gestes et paroles sont devenus plus aisés, plus naturels, je me suis sentie mieux dans ma peau…

En dehors du monde du travail, je me suis mise également à me lancer des petits défis. Par exemple, je me souviens d’un jour d’hiver où j’ai pris le train toute seule (rien que ça c’était une aventure) et je suis allée à la mer où j’ai mangé seule dans un restaurant. C’était un grand pas pour moi. Des petits défis comme ça, je m’en suis lancée plein et je les ai tous relevés.

 

Quand je vois ce que je suis devenue aujourd’hui, je vous avoue que je suis fière du parcours de l’ex-petite timide que j’étais. Il y a quelques années, jamais je n’aurais imaginé qu’un jour je parlerais de mes romans devant une assemblée, que je participerais à des salons, que j’accorderais des interviews, que je guiderais des groupes en tant que guide-nature, que j’animerais des réunions à mon boulot, et même que j’entamerais la conversation avec de parfaits inconnus dans les magasins ou les lieux publiques !! Quand j’étais petite et que ma maman faisait ça, j’étais horriblement gênée. Je me demandai pourquoi elle s’adressait à des étrangers qui ne lui avaient rien demandé. Aujourd’hui, je fais la même chose, si pas pire, et j’adore ça !

 

Attention, je ne prétends pas que ma timidité n’existe plus ! Je suis malade de trac avant de prendre la parole devant un groupe, je n’en dors pas, j’ai des suées, je tremble et mes intestins se manifestent… mais je le fais, et j’en retire une grande satisfaction.

 

Quand je vois le chemin parcouru, je suis heureuse d’être comme je suis aujourd’hui. Pour rien au monde je ne voudrais retourner dans le passé et à nouveau raser les murs en essayant de passer inaperçue.

 

Et vous savez quoi ? Il n’y a pas si longtemps que ça que j’ose entrer dans une petite boutique toute seule sans passer d’abord devant la vitrine J

Publié dans SOUVENIRS

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L
<br /> Plus tard, j ai rencontré l ame soeur, mais a 35 ans!J en ai 60 maintenant, comme on dit, mieux vaut tard que jamais.<br /> Bonne soirée Latil.<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Mariage plus vieux, mariage heureux ! Tous mes voeux de bonheur <br /> <br /> <br />
L
<br /> Comme je te comprend bien! j ai connu aussi pas mal de déboires dans ma jeunesse, et en plus j étais bégue...Plus tard avec les filles... enfin bref. Pour sortir de l isolement, j ai voyagé, en<br /> voiture, en train partout en Europe, et mes chemins m ont conduit vers l est, lá ou il avait des filles pas trop regardantes, et enfin j en ai trouvé une, mais cela n a pa duré longtemps,il a fallu<br /> divorcer. Voila un tableau de ma jeunesse.<br /> Bonne soirée Latil<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Une vie semée d'embûches à cause de cette foutue timidité... Et maintenant, Latil, comment te sens-tu ? As-tu réussi à surmonter ce sentiment ? Est-ce que tes voyages<br /> t'ont permis de t'affirmer un peu plus ? J'espère que oui et te souhaite de rencontrer à nouveau une femme qui t'acceptera tel que tu es.<br /> <br /> <br />
F
<br /> c'est cette sensibilité qui passe dans ton écriture et nous fait aimer tes personnages car ils sont si proches de la réalité, l'on peut donc s'y retrouver, c'est ça le talent, savoir transformer<br /> nos faiblesses en force même si ce n'est pas toujours évident<br /> bisous :-)<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Wouaw, cela faisait un petit moment que je n'avais plus de tes nouvelles, mais là tu reviens en force et me fait un immense plaisir. Merci Fabienne ! Voilà le<br /> genre de commentaire qui me donne très envie d'écrire un petit troisième <br /> <br /> <br />
L
<br /> Chacun possède en lui ce qu'il faut pour vivre.<br /> <br /> Il y a bien des gens qui n'oseraient pas faire le dixième de ce que tu fais et qui sont heureux !<br /> <br /> Tu es comme tu es et si les gens t'apprécient c'est que tu leur plais ainsi ! Quant à ceux qui ne t'apprécient pas (s'il y en a ?), ignore-les. Ils ne sont pas dignes d'être tes amis, même sur<br /> Facebook ! <br /> <br /> <br />
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C
<br /> Merci Louis.<br /> J'ai abandonné Facebook depuis longtemps. Je trouvais qu'il y avait effectivement beaucoup d'hypocrisie, et puis les vrais amis n'ont pas besoin de cet outil pour garder de le contact .<br /> <br /> <br />
C
<br /> Merci pour ta réponse , chère Cathy. Mes compliments étaient sincères, et complètement désintéressés, malgré la forme involontaire que j'ai donnée à mon billet!<br /> Bises<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Aucun souci Célestine !  Gros bisous !<br /> <br /> <br />